( 12 septembre, 2008 )

La jeunesse dans les luttes sociales

Abdelouhab Fersaoui est un jeune militant algérien. Venu participer au 1er Forum Social Maghrébin, ce fut l’occasion pour moi de le questionner sur la jeunesse algérienne. Qu’a-t-elle en commun avec celle du Maroc ? Il parait évident, en écoutant son discours, que les jeunes au Maroc ou en Algérie ont des luttes similaires, et parfois malheureusement ils font face à la même violence des autorités quand il s’agit de descendre dans la rue pour faire entendre leur voix. Jeunesse ignorée qu’on ne veut même pas écouter. Interview…

1. Pourrais- tu te présenter ?

La jeunesse dans les luttes sociales L135xH175_jpg_photo_1-42420Je suis Abdelouhab Fersaoui, venu de l’Algérie, je représente une association nationale de jeunes : le RAJ (Rassemblement Action jeunesse). Je suis venue au Maroc représenter mon association et les jeunes algériens dans les travaux du portail web Maghreb/Machrek [1]. J’ai auparavant assisté au déroulement des préparatifs du Forum Social Maroc de Janvier 2008.

2. Quelques mots sur ton association ?

RAJ est une association créée en 1993 par un groupe de jeunes algériens dont l’objectif est de promouvoir la défense des droits de la personne humaine, et d’encourager l’émergence des initiatives des jeunes dans le domaine culturel, scientifique, sportif, d’éducation et de citoyenneté. Nos actions se font par des campagnes de sensibilisation, des formations, des stages sur la culture des droits de l’homme.

3. Comment s’est crée l’association ?

Elle s’est crée dans une situation politique instable vécue depuis l’arrêt du processus électoral démocratique en 1992 par des militaires [2]. Cette situation a plongé l’Algérie dans un bain de sang en faisant plus de 200 000 morts, des milliers de disparus, des milliards de dollars de perte dans l’économie nationale, sans parler de la dégradation du niveau de vie de la population. Dans tout ce flou, les jeunes ont perdu leur repères et sont les premières victimes car ils se retrouvent sans perspectives. C’est pour cela que nous voulons faire du RAJ, un espace rassembleur et une tribune d’expression pour les jeunes.

4. Dans quel contexte sociopolitique le mouvement associatif en Algérie a t’il émergé ?

Depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962, c’est le régime du Parti Unique (fermeture du champ politique et médiatique) qui a mené l’Algérie à ruiner l’économie nationale et qui a réprimé toutes les forces autonomes. Ce marasme social a déclenché les événements du 5 oct. 1988. Les jeunes sont descendus manifester dans les rues pour revendiquer l’amélioration du mode de vie et l’ouverture du champ politique et médiatique [3]. Ces manifestations se sont déroulées à l’échelle nationale. Malheureusement le régime algérien n’a pas hésité à réprimer violement ces manifestations en faisant plus de 500 morts [4] par balles de la part des forces de l’ordre algérien. Ces événements ont amené une brèche du champ politique et médiatique, ce qui a donné naissances par la suite a des partis politiques, des syndicats autonomes et des associations. Apres la nouvelle constitution de 1990, tout avait l’air de fonctionner jusqu’à l’arrêt du processus électoral démocratique en 1992 (NDLR : il s’agit du coup d’état). Depuis les associations autonomes travaillant en faveur de la population subissent une répression farouche de la part des autorités qui leur empêchent très souvent de faire leurs activités ou de manifester. De plus elles ne reçoivent aucune aide financière ou matérielle.

5. Changement de sujet, tu as participé au Forum Social Maroc en Janvier 2008, et au 1er Forum Social Maghrébin, quel est ton sentiment par rapport au processus pour un Maghreb des peuples ?

Je suis très content d’y avoir participé. Lors des ateliers, des choses concrètes en sont sorties. J’ai bénéficié de l’expérience des autres, d’autant plus qu’il s’agissait (en Janvier) de mon premier contact avec des organisations internationales. Ces rencontres m’ont permis d’échanger des expériences et d’établir des contacts dans la perspective de travailler ensemble. On représente une jeunesse qui a une soif inassouvie d’apprendre de se cultiver, de travailler afin de participer pleinement au développement de notre pays.


[1] Désigne l’Orient arabe, de l’Égypte à l’Irak et à la péninsule arabique.

[2] Coup d’état militaire : le Haut conseil de sécurité renverse le président Chadli Bendjedid

[3] Après Oct.88 on assiste à la création d’une presse autonome capable désormais de dénoncer et de faire la vérité sur certains faits. De plus les événements de 88 ont amené au multipartisme politique : désormais le parti unique mené jusque là par le FLN ne sera plus le seul sur la scène politique. Des partis politiques vont ainsi voir le jour, tandis que d’autres déjà existants vont pouvoir sortir de leur clandestinité

[4] Le bilan officiel table à 176 morts, 900 arrestations et des dégâts matériels de plusieurs milliards de dollars

 

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